dimanche 31 mai 2015

Annelyse Simao
Angers,  le 21 mai 2015



























"Si je n'ai plus le droit ni soif de dire
ce qui va de travers, sous le tissu neuf

rimmel sur les paupières
sourire sur les lèvres

est-ce consolation de savoir nombreux
ceux qui se sont perdus
par leur talent

pour l'ombre
                  ?"

Extrait de A l'échaffaudage paru aux éditions AEncrages & Co en 2013

mardi 19 mai 2015

Eric Pessan
Au Pannonica , à Nantes , en novembre 2014



























" Je garde les yeux fermés, les cloisons du train disparaissent, les animaux qui grattent le toit et tapent contre les vitres entrent, ce sont des renards, des cerfs, des sangliers; des buses et des faucons crécerelles, ils viennent venger les leurs happés par le passage des TGV depuis des années, ils déambulent dans la travée centrale, ils ont l'air de ceux qui savent leur victoire assurée, ils se taisent, les passagers craignent la présence des animaux; les défenses recourbées du sanglier, les crocs fins et aigus du renard et les bois des cerfs provoquent des frissons. les animaux sont en griffes , en cornes, en muscles, en sauvagerie, en serres et en brutalité, ils sont las d'être des proies, ils viennent réclamer leur revanche. Un sanglier s'attarde, les passagers frémissent en contemplant ses grès luisants, la bête doit peser plus de cent kilos, elle possède la puissance qui déchiquette les hommes.Des hérissons , des rats, des furets, des musaraignes, des belettes sautent de fauteuil en fauteuil ou se faufilent entre les jambes des voyageurs médusés. Je garde les yeux fermés alors que la nature prouve qu'elle n'est pas aussi domestiquée qu'il y semble. Immobilisé, le train n'offre plus la protection de ses 300 km/heure. Les animaux  impassibles regardent les passagers terrifiés, ils hument les odeurs de sueur et de peur et cette odeur leur est agréable, leurs naseaux frémissent de plaisir. (...)

Extrait de  Incident de personne  paru en 2010 aux éditions Albin Michel.

Eric Pessan vient de publier chez ce même éditeur Le démon avance toujours en ligne droite.